Focus
ENQUÊTE DU SDI : UNE REPRISE LOIN D’ÊTRE ÉVIDENTE POUR LES INDÉPENDANTS ET RESPONSABLES DE TPE !
Le premier semestre 2021 toujours en baisse
Des baisses de chiffre d’affaires constantes depuis mars 2020
Nous l’avions vu lors de nos précédentes éditions, le chiffre d’affaires des professionnels indépendants et dirigeants de TPE était en baisse au premier trimestre 2021, notamment en raison des mesures sanitaires (couvre-feu, télétravail,…).
Cette situation ne pouvait s’améliorer avec la période de confinement du second trimestre, y compris pour des commerces restés ouverts tels que la coiffure et les fleuristes notamment.
Au global, les chiffres d’affaires des commerces ont une nouvelle fois accusé une baisse de 20% à 30% au cours du premier semestre 2021, chiffre constant depuis mars 2020.
Des bilans 2020 moins brillants qu’annoncé par l’ordre des experts-comptables
Notons par ailleurs que les indépendants et responsables de TPE interrogés sur leur bilan 2020 sont beaucoup moins optimistes que l’ordre des experts-comptables ou la FCGA (Fédération des Centres de Gestion Agréés), lesquels indiquaient récemment une stabilité voire une amélioration des bilans 2020 par rapport à 2019. De fait, si la moitié des personnes interrogées porte les mêmes constats, du fait de leur travail, des aides de l’État ou de la baisse de leur rémunération, le fait est que l’autre moitié constate une baisse de résultats.
Une reprise très hétérogène depuis le 19 mai
Les chiffres sont formels : la consommation est en forte hausse depuis le 19 mai 2021, date du déconfinement progressif. Ces chiffres agglomérés, issus des données fournis par les grandes enseignes (pour le textile) et largement diffusés par Bercy, méritent toutefois d’être discutés.
De fait, l’INSEE démontre au sein des mêmes sources utilisées par les pouvoirs publics que :
– le niveau de reprise à l’issue de chaque confinement est systématiquement inférieur au précédent.
– les premières sont basées sur le volume de transactions cartes bancaires et… les données fournies par la grande distribution.
– le niveau de consommation est lui-même largement inférieur à 2019, et ce de façon constante depuis janvier 2020.
Ainsi, comparé à 2019, le niveau de consommation mai 2021 est de 4% inférieur, lorsque celui de Juin 2021 est de 2,5% inférieur.
Pour autant, l’affirmation d’une reprise est exacte pour les activités de bars et restaurants, ainsi que le BTP, bien que ce dernier secteur soit confronté à d’autres problématiques telles que la pénurie et la hausse vertigineuse du prix des matières premières accompagnées de difficultés générales d’approvisionnement (92% des entreprises du BTP interrogées).
Mais la forte reprise de la consommation est inégalement répartie avec 45% des professionnels interrogés qui affirment que leur chiffre d’affaires est toujours en baisse, lorsque 14% indiquent que la baisse de chiffre s’accroit.
Cette reprise intervient par ailleurs trop tardivement pour de nombreuses entreprises exclues de aides de longue date telles que la réparation automobile, la réparation et maintenance industrielle, ou les magasins multi-rayons avec respectivement +46%, +92% et +74% de défaillances entre le T1 2021 et le T2 2021. Même le bâtiment de second œuvre est à la peine avec +30% de défaillances.
Un avenir plus qu’incertain pour le tiers des personnes interrogées
A ce stade, 52% des personnes interrogées estiment qu’elles ne seront pas en capacité de compenser les pertes du premier semestre 2021 par une activité accrue sur le second semestre 2021, lorsque 40% n’ont aucune visibilité sur ce point. Seules 8% considèrent que le rebond futur de leur activité sera suffisant pour compenser les pertes du premier semestre.
Ainsi, le tiers des personnes interrogées doutent de leurs capacités à honorer les différentes échéances à venir sur les 6 prochains mois (banque, fournisseurs, loyers, salaires,…).
A noter que nous parlons bien ici des charges courantes, hors charges exceptionnelles qui viendront prochainement se greffer. Nous pensons notamment au remboursement des 7Mds€ de charges sociales personnelles reportées à intervenir à compter du dernier trimestre 2021, augmentées à compter de la fin du premier trimestre 2022 des 52Mds€ de PGE contractés par plus de 600.000 TPE. Dès à présent, 24% des personnes interrogées, soit 720.000 professionnels indépendants et dirigeants de TPE, estiment rencontrer des problèmes de trésorerie importants voire critiques.
Les TPE continuent à puiser dans leur PGE
Ce sont désormais 44% des TPE ayant contracté un PGE qui indiquent l’avoir consommé à plus de 80%, contre 37% lors de notre précédente enquête de février 2021.
Si ce chiffre n’est pas une surprise compte tenu de la nouvelle période de confinement intervenue entre temps, il souligne toutefois la grande précarité de désormais près de la moitié des TPE dont les charges fixes vont s’alourdir dès le mois d’avril 2022 au titre du remboursement de leur PGE, pour une grande majorité sur la durée maximum autorisée, soit 4 ans.
Une crise objet de profondes remises en question du modèle économique des TPE
Une remise en question pour plus de la moitié des TPE Il s’agit sans doute de la bonne nouvelle de cette enquête : plus de la moitié des professionnels interrogés ne sont pas restés passifs face à la crise de la Covid et ont revu leur modèle économique afin de s’adapter. Cette révision porte parfois malheureusement sur une compression de personnel, mais aussi sur le type de produits proposé ou le positionnement en prix.
Sur ce dernier point, beaucoup indiquent avoir compresser leurs marges ou diversifié leurs fournisseurs.
Citée dans 28% des cas, la digitalisation pour sa part reste le parent pauvre de ces évolutions.
La digitalisation reste un point faible des TPE
Dans le cadre d’une analyse plus poussée, il convient de préciser que la notion de « digitalisation » reste par ailleurs très éloignée des modèles du e-commerce qui ont généré 112Mds€ de CA en 2020 et représentent désormais 13,4% du commerce de détail ( Source : FEVAD).
Par « digitalisation », les professionnels entendent très largement « présence sur les réseaux sociaux » de type Facebook ou Instagram.
Si ce type de communication permet un lien avec la clientèle existante, sous réserve que cette dernière ait connaissance de cette communication, elle est très peu susceptible de développer une activité de vente à distance à des tiers dont la mise en œuvre est beaucoup plus complexe. Il est certes toujours possible de tenter seul l’aventure à l’aide de sites internet dédiés à prix contenus.
Néanmoins, la création ou l’adaptation de solutions préexistantes nécessite l’intervention de professionnels. La seule partie « développement » par un freelance coûte 600€/jour. Viennent ensuite se greffer d’autres professionnels (webmanager, graphiste, administrateur système, community manager,…) aux coûts journaliers sensiblement équivalents.
Une volonté d’anticipation des défaillances
Au regard des réponses communiquées quant à leur situation ainsi que des échéances financières à intervenir, il serait utile que chaque responsable de TPE puisse bénéficier de l’audit gratuit pour lequel le SDI a milité auprès des pouvoirs publics.
De fait, depuis le 21 juin, chaque chef d’entreprise qui en exprime le désir dispose désormais de la possibilité d’un tel audit auprès de son expert-comptable ou d’un mandataire judiciaire dans le cadre du Plan de sortie de crise. Cette proposition s’avérait d’autant plus essentiel que, à ce stade, seuls 3% des TPE se sont vu proposer spontanément cette possibilité par le partenaire professionnel du chiffre.
Selon notre enquête, 26% des personnes interrogées entendent engager une démarche d’audit de leur entreprise, soit 546.000 des 2,1 millions de TPE. Les professionnels du chiffre auront un travail important à fournir dans les prochaines semaines.
Selon 75% des personnes interrogées, ce dispositif pourrait utilement être combiné avec la prise en charge, au moins limitée dans le temps, des procédures judiciaires de prévention des difficultés des entreprises.